Sunday, September 18, 2005

Les Gandhis Palestiniens de Bi'lin continuent leur resistance non-violente/ The Palestinian gandhis continue to resist in Bi'lin

Samedi 17 Septembre…les Gandhis Palestiniens de Bi'lin continue a resister

Alors que le mois dernier les medias n'ont parlé que du désengagement de la bande de Gaza, la construction du Mur et l'expansion des colonies continue en Cisjordanie.
Depuis des mois un petit village de Cisjordanie, Bi’lin, situé à l’Ouest de Ramallah, organise chaque vendredi des manifestations non-violentes contre la construction du Mur autour de leur village. La première fois que j’ai entendu de ce village, c’est par l’intermédiaire d’une famille palestinienne qui m’ont invitée chez eux à Ramallah mais qui sont originaires de Bi’lin. Le patriarche de la famille était riche par toutes les terres qu’il possédait. Il a tout perdu aujourd’hui et il ne lui reste plus que sa maison. Ses terres ont disparu derrière le site de la construction du Mur, comme la moitié des terres du village.

Bi’lin est un village traditionnel entouré de belles montagnes mais aussi de colonies. Nous sommes à une dizaine de kilometres de la Ligne verte, le Mur rentre donc ici profondément dans les terres palestiniennes. Avec le Mur il est clair qu'ici il s'agit de prendre plus de territoires afin de faciliter l'expansion de la nouvelle colonie appelée Nahlat Heftziba.
Les villageois ont décidé de se mobiliser et de ne pas accepter cette injustice.
Ils ont crée un comité populaire contre le Mur. Un des membres fondateurs de ce comité, Mohammed Khatib a déclaré:
"Bilin est en train d'etre étranglé par le Mur...Apres que les courts israéliennes aient refusé notre appel pour empecher la construction du Mur, nous avons commence a manifester pacifiquement avec des Israeliens et des gens du monde entier contre la confiscation de nos terres. Nous avons choisi de resister d'une maniere non violentee car nous sommes des personnes paisibles qui sommes victimes de l'occupation. Nous avons ouvert nos maisons aux Israeliens qui nous ont rejoints. Ils sont devenus nos partenaires dans la lutte. Ensemble nous envoyons le message fort que nous pouvons coexister dans la paix et la securite. Nous souhaitons la bienvenue a tous ceux qui viennent en invites et pour travailler pour la paix pour els deux peuples mais nous resisterons tous ceux qui viennent en occupants." Leur approche non-violente les a fait surnommes les Gandhis Palestiniens.

Depuis des mois, chaque vendredi les habitants de Bi'lin utilisent leur droit de manifester. Ils se rendent sur le site de la construction du Mur faire face aux soldats. Ils ont fait preuve à chaque fois de créativité en usant de différents symboles et formes de protestation. Il y a eu une manifestation composée uniquement de femmes puis d’enfants. A d’autres occasions les manifestants se sont enchaînés aux oliviers, ou encore se sont menottés eux-mêmes afin de bien montrer qu’il s’agit avant tout de manifestations non-violentes. Ils ont aussi prié et chanté devant les soldats. Au fur et à mesure les médias ont de plus en plus couvert ces manifestations auxquelles participent désormais des Israéliens et des internationaux. Chaque vendredi on pense qu’il s’agit d’un scénario bien huilé et pourtant on ne sait jamais ce qui peut arriver. Tout peut basculer très vite. En effet en face, l’armée israélienne n’hésite pas à employer la force, d’une manière le plus souvent violente et excessive. On est loin des images du désengagement de Gaza de soldats compatissants ou compréhensifs. Il faut le savoir, quand on manifeste en Palestine on peut être arrêté mais aussi blessé ou tué. En Juillet 2005, un jeune de 16 ans de Bi'lin, Muheeb Assi, a ete tue par l'armee israelienne. Combien il y a eu de personnes blessées et arrêtées depuis le debut des manifestations à Bi’lin? A la première manifestation à laquelle j’ai assisté, il y avait eu une trentaine de blessés, notamment par des balles en caoutchouc. Cette semaine je suis donc retournée assister à la manifestation avec je dois dire une petite boule dans le ventre.

La journée a commencé par un concert au piano par un Israélien survivant de l’holocauste, tandis qu’un chanteur américain folk a sorti sa guitare et a chanté devant les soldats. Les manifestants ont fait face aux soldats puis ont essayé de contourner le barrage. Deux internationaux ont tenté de se rendre sur le site de la construction du Mur. Ils ont été rattrapé par les soldats, et arrêté d’une manière très violente, traînés par terre et avaient les poignets lacérés par les liens trop serrés. Les soldats se sont ensuite rapprochés des jeunes de Bi'lin qui commençaient à jeter des pierres. Les soldats israéliens ont répondu en utilisant des gaz lacrymogènes et en tirant des balles en caoutchouc. A ce stade je suis partie mais alors que je m’éloignais en taxi collectif du village, un des enfants a soudainement fait signe de fermer la fenêtre en criant « gaz gaz ! ». En effet le gaz a envahi le véhicule et nous nous sommes tous mis à tousser et pleurer. Nous étions pourtant à deux ou trois kilomètres du site de la manifestation. Le gaz pénètre ainsi dans le village, dans les maisons et je dois dire que le respirer ne serait-ce que quelques secondes est une expérience horrible, alors qu’en est-il pour les personnes âgées, les enfants et bébés, les personnes malades? Au total, huit personnes ont été blessées, par balles en caoutchouc ou inhalation de gaz lacrymogènes et six ont été arrêtées.

L’armée israélienne ne se contente pas de réprimer durement de telles manifestations, elle essaye aussi de les empêcher. La semaine dernière l’armée avait imposé un couvre-feu le jour de la manifestation à Bi’lin. Les civils Israéliens qui venaient participer ont trouvé des barrages leur interdisant l’accès au village. Les soldats sont aussi rentrés à Bi’lin pour exiger des Israéliens qui y séjournent en solidarité de partir. Quand ils ont refusé ils ont été arrêtés. Mais les villageois ont bravé le couvre-feu et sont sortis en cognant sur des casseroles. Ils ont été finalement rejoints par 300 Israéliens qui ont réussi à rejoindre Bi’lin en passant par une colonie et en marchant des kilomètres. Cette semaine des activistes israéliens ont été également empêchés d’atteindre le village.

La violence dont fait preuve l’armée commence à être questionnée. Comme souvent ce sont des images choquantes d’activistes battus par les soldats qui ont fait réagir l’opinion. Trois juges israéliens ont ainsi récemment fustigé l'armée pour un usage excessif et non justifié de la force contre les manifestants. Je ne parle cependant que de l’opinion israélienne car de tels actes, alors que le conflit est tellement médiatisé, ne trouve curieusement pas d’écho dans les médias internationaux. Pourquoi ces actes de résistance non-violente ne sont pas médiatisés tandis que les confrontations entre soldats israéliens et colons à gaza ont donné lieu à un grand tapage médiatique ? La résistance non-violente existe en Palestine, elle commence aussi par le simple fait pour les Palestiniens de ne pas partir. Bi’lin n’est par ailleurs pas le premier village à organiser de telles manifestations qui se sont multipliées depuis deux ans. Avant il y a eu Marda, Budros, Jayyus, Biddu ou Beit Surik. Mais qui en a entendu parler ?

Si l’armée réprime si durement de telles manifestations, c’est qu’elle sait le potentiel que pourrait représenter une multiplication de telles évènements en Palestine, notamment aux yeux de l’opinion internationale. Nous en sommes encore loin. A la manifestation de vendredi, il n’y avait que 50 manifestants, et presque autant de soldats et photographes. Les internationaux et activistes Israéliens étaient plus nombreux que les habitants du village. Beaucoup de Palestiniens sont las de ces manifestations qui ne semblent rien changer, alors à quoi bon prendre le risque de se faire tuer ? Le caractère non-violent n’a aussi duré qu’un temps et finalement une fois que la manifestation s’est dispersée, les jeunes du village ont commencer à lancer des pierres car c’est ainsi qu’ils expriment leur colère et frustration.

Pourtant semaine après semaine, la manifestation a le mérite d’exister et représente en tant que telle un symbole et une lueur d’espoir : une autre manière de résister, qui si elle se développe et si elle n’est pas asphyxiée par les gaz lacrymogènes ou tuée par les balles, pourrait représenter une force motrice dans le conflit et changer les perceptions sur les protagonistes.


Saturday 17 September .

While all the media attention has been devoted to the desengagement of the Gaza Strip in the last few months, the construction of the Wall and the expansion of settlements continues in the West Bank.
On Friday, I decided to go back to Bi’lin. Since months, the inhabitants of Bi’lin together with Israeli peace activists and internationals organize every Friday a demonstration against the construction of the Wall around the village. Bi’lin is a beautiful village surrounded by mountains but also settlements, located West of Ramallah. The first time I heard about it was through a Palestinian family I stayed with in Ramallah. They are originated from this village and told me how the Patriarch of the family has lost all his lands because of the Wall. Once considered as quite wealthy, he is left with nothing but his house. The construction of the Wall, which stands in Bi’lin far from the Green Line, has indeed resulted in the loss of more than half of the village’s land. Most of the income of the 1,600 inhabitants from Bi'lin depend on these lands. When we see the construction of the site and the settlement nearby, it appears clear that the construction of the Wall inside Palestinian territories aims at annexing more Palestinian lands and facilitates the expansion of the new settlement called Nahlat Heftziba.
But the inhabitants of Bi’lin have decided to fight this injustice in their way, by using non-violent means of resistance. Thus every Friday, they use their right to protest and go to the construction site and face the soldiers. They organised themselves in a Popular Committee Against the Wall. One of the leading members, Mohammed Khatib declared:

"...Bilin is being strangled by Israel's wall... After Israeli courts refused our appeals to prevent wall construction, we, along with Israelis and people from around the world, began peacefully protesting the confiscation of our land. We chose to resist non-violently because we are peace-loving people who are victims of occupation. We have opened our homes to the Israelis who have joined us. They have become our partners in struggle. Together we send a strong message - that we can coexist in peace and security. We welcome anyone who comes to us as a guest and who works for peace and justice for both peoples, but we will resist anyone who comes as an occupier."

Because their approach is non-violent, they are now called the Palestinian Gandhis.They have used their creativity and every Friday is different. Once there were only women, then only children. They tied themselves to their Olive trees. They also handcuffed themselves to show that they do not intend to use violence. They sang and prayed in front of the Israeli soldiers. Sometimes they were numerous, sometimes only a few but the consistency of the weekly protest is beginning to find some echoes in the medias. Every Friday the storyboard seems to be the same. However everybody is aware that anything can rapidly change and that one can be arrested, injured or even killed. The Israeli army does not hesitate to repress them by using a disproportionate use of force. Protesting is simply a very dangerous act in Palestine, where one put his life at risk. On July 2005, a a 16-year-old from Bilin, Muheeb Assi, was shot to death by the Israeli army during one of the demonstrations. How many people- Palestinians, Israelis and internationals have been arrested, injured, or killed during such demonstrations? Nobody knows.

The violence has begun to be questioned within Israeli society, notably following the release of some videos showing the beaten up of non-violent protestors. Even the Israeli Courts have used such video to order the release of some Palestinians that clearly were violently arrested without any justification other than the political aim to deter them to participate or organise such demonstrations. However these images do not go beyond the Israeli and Arab medias and I wonder why, as the Israeli-Palestinian conflict attracts so much media coverage. Why non-violent resistance of Palestinians is not shown while there was so much coverage of the confrontations between the Israeli soldiers and settlers in Gaza or on the demonstrations from settlers? Bi’lin is not the first case and other villages have been also protested such as Marda; Jayyus, Biddu and Beit Surik. But once again who have heard of them?

This Friday I did not go to the demonstration with a quiet mind.
Especially the last two demonstrations in Bi’lin have resulted in many injuries and arrests. Now the army seems not only to violently repress the demonstration but tries to prevent them even before they start. Last Friday the army tried to prevent the participation of Israeli peace activists to participate in the demonstration by setting up roadblocks around Bi’lin and declaring a curfew. They ordered the Israelis that stay in Bi’lin in solidarity to leave and when they refused they arrested them. Nevertheless some inhabitants of Bi’lin defied the curfew and went out, hitting on pots, a gesture that echoes what has been used in South America. They were joined by 300 Israeli activists who managed to reach the village through a settlement and after a walk of several kilometers. The violent response from the army resulted in many injuries.
This week the highlight of the day was the participation of an Israeli pianist, an holocaust survivor, who made a small concert and of an American folk singer who sang in front of the soldiers against the occupation. The protestors faced the soldiers and then some tried to bypass them to reach the construction of the site. Two internationals were then very violently arrested. They were dragged and the hands were so tightly tied that their wrists were red and cut. The soldiers then moved closer to the youth of the village who have begun to throw stones. The soldiers threw a lot of tear gas and began shooting rubber bullets. Usually this is at this moment, when most of the journalists left the site, that most injuries occur. I left and I finally could breathe without smelling that awful gas that burns your eyes and makes you cry. But in the collective taxi suddenly one of the child showed the open window and shouted “gas, gas!”. The gas invaded the car. We were nevertheless a few kilometers from the location of the demonstration. It means that the gas goes everywhere in the village and inside the houses, and it should be so bad for the children and babies, the sick and old people.
At the end of the day, eight injuries were reported, by rubber bullets and inhalation of tear gas and six people have been arrested. If the demonstrations are so severely and violently repressed, it is because the Israeli government knows the impact that could have the multiplication of such demonstrations on the international opinion. However we are far from a mass movement. At the demonstration on Friday, the protestors were only around 50 and there were as many as soldiers and photographers. Furthermore, among the protesters there were more internationals and Israelis than the inhabitants of the village. Many Palestinians are tired of these demonstrations which seem to have no result so why taking the risk of being killed? Nevertheless, week after week the demonstration has the merit to exist and Bi’lin represents a symbol and a glimpse of hope that, if it is not suffocated by tear gas or killed by rubber bullets, expands and becomes internationally covered by the media, could expand into a moving force in the conflict.

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